Quai des Orfèvres

by - mai 23, 2018



QUAI DES ORFEVRES
D'Henri-Georges Clouzot

Jenny est une «délicieuse» jeune chanteuse. Si elle joue de sa plastique avantageuse pour avoir des contrats. Elle aime son mari, qui d'origine bourgeoise a tout abandonné pour elle, pour pouvoir l'épouser. Mais la jalousie le taraude, et le comportement de sa femme accentue cette douleur. Un jour un vieillard pervers et manipulateur se rapproche de Jenny en lui proposant un rôle, on n'a pas de doutes sur ce qu'il attend d'elle, mais Jenny pense maîtriser la situation...

Alors que le key maker de ce blog et moi avons vu un certain nombre des films de ce cinéaste, quai des orfèvres est pour moi à la fois un film représentatif de ce qu'est l'art d'Henri-Georges Clouzot et un film d'une modernité déstabilisante.

Ce film est un thriller efficace. Un meurtre, plusieurs suspects des pans de l'histoire qui expliquent une partie de l'intrigue mais qui épaississent le mystère. Un scénario efficace qui nous mène par le bout du nez qui s'appuie sur un roman policier de Stanislas andré Steeman.

La réalisation, quant à elle, choisit d'emprunter aux films noirs quelques éléments. Une femme fatale, et glamour Jenny. Enfant malheureuse qui veut que sa vie d'adulte soit glorieuse et riche,
oubliant qu'elle a déjà l'essentiel. C'est pour elle que son mari et une autre personne se mettront dans une situation périlleuse. Interprétée par Suzy Delair, le rôle de Jenny est à la fois clé, mais jamais aussi sombre que les femmes fatales des films noirs. Elle arrive à y mettre de la légèreté et à faire percer son amour pour son époux.
Les éléments caractéristiques de ces films sont mis en avant. Ici, une fourrure, une voiture sublime, sont bien plus que des accessoires, ils deviennent des points clés de l'histoire
Pour un film noir il faut un enquêteur, avec chapeau de préférence. Ici c'est un policier revenu de tout, «des colonies» reflets d'une autre époque, revenu des femmes avec qui il est malchanceux, revenu de sa hiérarchie et de la volonté de prendre du galon. Et c'est Louis Jouvet qui l'interprète. Malgré les maladresses de son personnage, il est toujours attachant et c'est en partie grâce à son interprétation.

À l'écran Quai des orfèvres est un film très sombre, avec des contrastes très forts. Et les rares scènes baignées de lumières ne sont jamais les plus transparentes. 
La succession très rythmée des scènes, et le montage dynamique explique le rythme haletant de la narration, et permet aussi de passer outre les rares facilités de scénario.
Ce long métrage est la version optimiste du film noir. Les postulats se ressemblent, le cahiers des charges y ressemble, mais les twists ne sont jamais ceux que l'on aurait anticipé. Et s'il a les attributs du film noir, il n'en est pas un. Mais une question se pose, cachée sous ce thriller au titre qui rappelle le siège historique de la police judiciaire; n'y aurait-il pas un film sur l'amour?
Sur la difficulté d'aimer de Jenny et Maurice. La manière dont Clouzot filme l'inconséquence de jenny en la baignant de lumière, contraste tant avec celle qu'il utilise pour filmer Maurice, des noirs intenses qui se transforment en noirs et gris. Sur certains plans, quand il perd pied, il y a une sensation de profondeur provoquée par le format et la mise en scène, qui nous fait ressentir le vertige de cet homme. Bernard Blier prête ses traits à Maurice, il est touchant dans ce rôle d'homme déchiré, il y est quasiment à contre emploi. Son interprétation est épidermique. Il transcende son rôle.
Ce long métrage parle des malheureux en amour, à l'image de l'inspecteur principal adjoint Antoine, qui a quitté «les colonies» comme il le dit avec son fils et se retrouve seul à l'élever. 
Et cet amour filiale transperce le film. Il est son supplément d’âme. Il ne rend pas plus humain le personnage de l'inspecteur, il rend plus humain le film tout entier. La mignonnerie avec laquelle il s'occupe de lui, dont il parle de lui, réchauffe le scénario.
Cet enfant et un des points qui m'a le plus éblouie dans le film. 

Film qui sort sur les écrans en 1947 et qui met en scène cet enfant un enfant métisse. Sans en faire des tonnes autour de lui, juste en le couvrant d'amour.
Et une personne homosexuelle, pas représentée de manière stéréotypée,et que l'une des dernières phrases du film, mettra au même niveau qu'un hétérosexuel.

Ce long métrage est un ovni cinématographique qui s'est glissé dans des habits de normalités. C'est un film qui est ponctué d'amour et de respect,le tout autour de l'histoire d'un couple et de la jalousie. La petite histoire rattrapa celle du film. Le réalisateur reparti avec la femme de l'un de ses acteurs




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